Afin de fêter l’arrivée de 2014, j’ai le plaisir de vous offrir le chapitre 2 ! N’oubliez pas que le chapitre 1 est déjà disponible dans un ancien artcicle. Bonne lecture
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Mercredi 19 septembre 2012, 09h40, BIOLABS
L’inspecteur Mathieu Deville ne laissait transparaître aucune expression. Malgré sa courte expérience – il n’avait que trente deux ans et le poste d’inspecteur ne lui avait été accordé que deux ans auparavant – il était réputé pour être un très bon enquêteur. Marié et père de deux enfants – Léna 11 ans et Maxime 8 ans – il était fier de ce qu’il avait bâti avec son épouse, Isabelle, et vivait une vie conjugale heureuse, pleine de tendresse. Au travail, il restait quelqu’un d’extrêmement exigeant avec ses collaborateurs car il ne tolérait pas l’erreur. Il mettait un point d’honneur à être aussi exemplaire et juste dans sa vie privée tout comme dans ses enquêtes ou ses rapports. Sa petite taille, ses épaules larges et sa coupe de cheveux blonds coupés ras lui faisaient plus ressembler à un militaire qu’à un policier.
Il regardait en l’air, ou plutôt promenait son regard, sans jamais s’arrêter un instant sur David qui était assis de l’autre côté de la table. Il semblait attendre quelque chose. Les deux hommes se trouvaient dans la pièce qui servait de réfectoire au personnel de BIOLABS. Une pièce sans âme, de couleur blanche, où l’on trouvait quatre tables organisées comme sur la face d’un dé, un four micro-ondes disposé sur une étagère murale fixée au dessus d’un plan de travail qui comprenait une cafetière, une boite à sucre et des cuillères, un évier pour faire la vaisselle. Les fenêtres, solidement fermées électroniquement, donnaient sur une bande de terre en friche d’à peu près dix mètres de long, une clôture haute de cinq mètres, puis un champ de maïs dont on ne semblait pas voir la fin. David n’était pas dépaysé par la vue, le réfectoire se trouvait du même côté du couloir que son labo qui en était une copie conforme, en terme de géométrie. Assis sur la chaise sur laquelle il avait déposé sa veste en jeans, il hasarda :
– Monsieur l’inspecteur ?
Pour toute réponse l’inspecteur Deville présenta son index droit juste devant sa bouche et émis ce petit mot, « chut ».
David ne comprenait rien à ce qu’il était en train de vivre. Qu’avait-il fait pour se retrouver seul avec un inspecteur de police dans le réfectoire sans que ce dernier ne daigne lui adresser un mot ?
Ses pensées furent interrompues par la sonnerie du portable de l’inspecteur Deville
– Deville, allo ……… tant pis, prévenez moi lorsqu’il sera réveillé……..oui, c’est çà à tout à l’heure.
David lança un regard interrogateur. L’inspecteur se décida enfin à ouvrir l’interrogatoire :
– Monsieur Merchant, je suis désolé pour cette attente mais nous attendons le réveil d’un de vos collègues à l’hôpital, j’aurais préféré vous interroger après, mais il va falloir que nous avancions.
David s’illumina :
– Je suis soulagé, l’autre agent m’a annoncé le décès d’un collaborateur mais en fin de compte il s’en est sorti !
– Oh que non, il s’agit d’un autre homme, le veilleur de nuit. Il a été retrouvé par le gardien de jour, Roger Langlais je crois.
David senti sa courte joie s’amenuiser.
– Alors ? Qui est mort ?
– Steve Mancini, votre collègue analyste, je suis sincèrement désolé.
David senti plusieurs émotions envahir son cerveau : la tristesse tout d’abord, d’avoir perdu un collègue avec qui l’entente était parfaite, le désarroi aussi, après tout ils étaient ensembles hier soir et il ne s’imaginait pas apprendre une telle nouvelle le lendemain, l’incompréhension, Steve était une personne sans histoire, célibataire tout comme lui, personne ne pouvait en avoir après lui, puis surtout la colère, après tout on le traitait comme un suspect !
– Bon sang, et vous attendiez quoi pour me le dire !!! Je travaille – travaillais, pardon – avec Steve depuis cinq ans et cela fait au moins une demi-heure que vous êtes devant moi sans sortir un mot !!!
– Calmez-vous monsieur Merchant, il y a une bonne raison à cela. En plus du décès de monsieur Mancini, d’autres évènements sont survenus cette nuit : son laboratoire a été retourné et le veilleur de nuit s’est fait agressé, et salement. Il souffre de commotion cérébrale et ne s’est pas encore réveillé.
David n’en croyait pas ses oreilles, BIOLABS cambriolé ! Il ne croyait pas cela possible. Même si la sécurité n’était pas celle d’un camp militaire, les caméras, serrures électroniques et autres alarmes devaient, à défaut d’empêcher, au moins dissuader toute tentative de cambriolage. Et surtout il n’y avait rien à voler chez BIOLABS : pas d’argent liquide, pas de richesse, quelques prototypes de médicaments mais rien de monnayable. D’ailleurs, puisqu’il y pensait :
– Et les caméras ? Vous devez bien savoir ce qu’il s’est passé ?
– Non monsieur Merchant, les caméras n’ont rien enregistré entre 1h40 et 2h10, heure à laquelle l’équipe de police est intervenue.
– Ca ne me dit pas pourquoi vous me traitez comme un suspect ! lança David d’un ton agressif.
– Nous ne vous traitons pas comme un suspect monsieur Merchant, du moins pas encore. Mais comprenez bien : il semblerait que vous soyez la dernière personne à avoir vu Steve Mancini en vie, admettez que nous espérons beaucoup de ce que vous pouvez nous apprendre. De plus, vous êtes le plus proche collaborateur de monsieur Mancini, il n’y a eu aucune effraction de son laboratoire – entendez par là que sa porte n’a pas été forcée – et en éditant les listings de pointage des badges électroniques, il s’avère que c’est lui qui a ouvert sa porte à 01h54 précisément. Nous aimerions beaucoup que vous nous parliez de monsieur Mancini, s’il avait changé de comportement ces jours-ci, si vous aviez noté quelque évènement qui sorte de l’ordinaire. Tout ce dont vous pourrez vous rappelez nous sera très utile.
– Vous n’aviez pas besoin de m’isoler de cette façon pour me demander toute ces choses, non ?
– Détrompez-vous, nous avons besoin que vous puissiez faire un inventaire du labo, voir s’il manque quelque chose ou quoique ce soit qui vous semble anormal. Croyez-moi monsieur Merchant, quelque chose me dit que c’est dans le labo que se trouve l’élément qui fera avancer l’enquête.
– D’accord inspecteur, mais je n’aime pas vos méthodes.
– Je ne vous demande pas de les aimer mais simplement de collaborer.
La tension était palpable dans la pièce. L’inspecteur jaugeait David, alors que ce dernier hésitait entre attiser la conversation ou bien coopérer. Deville le sentait, c’est pour cela qu’il ne cessa de plonger ses yeux dans ceux de David. Finalement David se détendit :
– Par quoi souhaitez-vous commencer ?
– Racontez-moi votre journée d’hier.
Mercredi 19 septembre 2012, 10h11, quelque part en France…
– Allo, comment allez-vous cher ami ?
– Mal, le second segment n’a pas été récupéré, j’ai été prévenu hier soir, j’attends des nouvelles de mon contact sur place.
– On a un gros problème. Je vous rappelle que l’opération « Flamme Pourpre » doit avoir lieu dans trois jours.
– Je le sais, mais le premier segment est prêt, vous savez où. Cela m’a été confirmé tout à l’heure du site numéro deux.
– Oui, mais vous savez que sans les deux parties…
– Bien sur que je le sais !
– Rien ne doit interférer avec le timing… Vous l’aurez à temps ?
– Je vous le promets.
Fin de la conversation